Décryptage : Ayumi Hamasaki - Moments

Publié le par Ananda

 De la même manière que les Dantologues décortiquent chaque vers, même les plus solitaires, de la Divine Comédie, les textes d'une des plus grandes philosophes/alcooliques/chanteuses -quand ses rhumatismes le lui permettent- japonaises méritent une analyse poussée, analyse sur laquelle de nombreux experts se penchent. Je vais vous livrer aujrd'hui mes clefs pour comprendre cette oeuvre majeure de la musique, et néanmoins charmante chanson, qu'est Moments, d'Ayumi Hamasaki.

Lalalalalalalalalalalalalala Lalalalalalalalalalalalalala Lalalalalalalalalalalalalala Lalalalalalalalalalalalalala
Dès le début du morceau, l'auditeur est immédiatement interpelé par ces audacieuses vocalises, dont on ne saurait à la première écoute déceler l'intense portée. Pourtant, c'est bien un chemin vers la transcendance qui nous est offert dans ces vers -ce qui suit est remarquable- à la symétrie parfaite. Mais finalement, au délà de l'esthétique mystique indiscutable, il convient de se pencher sur l'analyse de cette introduction, ce que nous ne pouvons malheureusement pas faire sur un blog de vulgarisation (la jpop n'est pas assez vulgaire comme ça). A ce sujet, les plus folles spéculations circulent : serait-ce un message caché sur l'assassinat de JFK ? Un code secret à l'intention des extraterrestres ? Du remplissage pur et simple ? Nous laisserons les Ayulogues trancher.

Ton coeur a commencé à roussir et j'ai senti cette odeur

Un constat terrible s'impose à la lecture de cette ligne. Qui est bien placé pour connaître l'odeur d'un coeur qui roussit ? Il existe deux personnes qui peuvent avoir l'expérience de cette odeur : les chirurgiens et les cannibales. Ayumi ayant été une bad girl déscolarisée très tôt, il est d'un goût douteux (plus encore que celui de l'aubergine) d'envisager qu'elle ait pu poursuivre des études de médecine. Ayumi Hamasaki est donc cannibale ! Cette odeur de coeur roussi, qui lui met la bave aux lèvres, est le signe qu'elle doit courir au jardin afin de retirer son repas du barbecue.

C'était la fin de ton rêve et le début de tout

Bon en fait, c'était surtout la fin de sa vie si on considère que son coeur est sur le grill. Quant à ce "début de tout", Ayumi maximise un peu l'importance de la faim qui la tenaille à l'instant où elle écrit. Mais qui n'a jamais pensé renaître devant un bon foie de veau ?

Ce que tu adorais te semblait beau
La personne qu'Ayumi se prépare à dévorer n'était vraisemblablement hystérique, sinon elle n'aurait pas adoré ce qui lui semblait beau. On remarque que depuis le début, elle nous parle au passé ...

Le fait que tu ne puisses l'atteindre le rendait encore plus brillant
Finalement, cette personne était quand même un peu névrosée. C'est un des plus magnifiques retournements de situation de l'oeuvre Hamasakienne !

Les morceaux brisés de ton rêve ont percé mon coeur, laissant cette douleur que je n'oublierai jamais
Alors là une explication s'impose. Les tabloïds chinois, en général peu fiables pourtant, ont révélé il y a quelques années qu'Ayumi entretenait une relation avec un fabricant de vitraux polonais. L'homme, plombier de formation, rêvait de réaliser un vitrail de 216 mètres sur 4 centimètres représentant Ayumi au sommet de sa gloire. Seulement, l'homme qui était aveugle, n'avait lu en braille que le dernier Vivi avec en couverture Kumi Koda, et avait réalisé une oeuvre à l'image de la chanteuse sans culotte. Folle de rage, Ayumi a lancé sa canette de bière sur le morceau de verre, qui a volé en éclats, dont certains se sont plantés dans sa poitrine. On dit que les nuits de pleine lune, on peut entendre les hurlements plaintifs et néanmoins nasillards d'Ayumi, déchirée en son propre sein.

Si ma vie était éphémère comme celle d'une fleur, je serai en pleine floraison à tes côtés
Certes, mais ce n'est pas le cas. Qu'essaye de nous dire Ayu ? Qu'elle est à cours d'héroïne et qu'elle voudrait qu'on lui ramène du pavot pour le ruminer ? On ressent en tous cas une intensité bouleversante dans cette déclaration, dans laquelle on sent une Ayumi terriblement borderline, au bord du suicide (elle souhaite que sa vie soit "éphémère"). L'école kosovarde d'Ayulogie a développé une théorie non moins intéressante : ces vers seraient dédiés à Roicutane qui aurait aidé Ayu à vaincre son acné. La star souligne bien qu'elle n'est pas en pleine floraison, elle n'a donc plus de boutons.

Et après avoir regardé ton sourire, je serais seule, calme
On reste au conditionnel pour ce vers. Cela est remarquable de voir cette concordance des temps entre ces deux lignes. En tous cas, si Ayu ressent l'impérieux besoin de se calmer et de s'isoler après avoir regardé le sourire de son interlocuteur, c'est évidemment parce que celui-ci est un ennemi déclaré de Colgate.

Comment était le paysage que tu as vu quand on t'as poussé dans un abîme de désespoir ?
Ayumi se fait moqueuse sur ce vers, et on la comprend bien. Tout d'abord, il n'a évidemment rien vu puisqu'il est aveugle. De plus, l'homme est apparemment tombé du haut d'une falaise, mais il n'a évidemment pas glissé, on le comprend au ton narquois d'Ayumi. Ce pronom impersonnel qu'est le "on" est encore plus éloquent que l'aurait été la première personne dans ce cas. Alors qu'ils s'étaient arrêtés afin de contempler un panorama quelconque, Ayu, qui aime faire des blagues aux handicapés, l'a poussé de tout en haut et l'a regarder faire des roulés-boulés. Alors que tant bien que mal il est parvenu à remonter, à sa manière, la chanteuse lui demande "ça t'a plu?", avec un sourire mi-radieux mi-sadique qu'on n'a aucune peine à imaginer.

Ton coeur nu erre, n'ayant nulle part où aller
Sinon, prochainement, dans l'estomac d'Ayumi.

Et installe des épines pointues tout autour par peur d'être touché
Et finalement, on le comprend ! Cependant, cette anthropomorphisation du coeur opérée par Ayumi est étrange. Dans son intense naïveté poétique, Ayumi imaginerait-elle que le coeur est un petit bonhomme qui construit des palissades, comme lors de Mai 68, mais en plus organique ? Nul ne l'a su et ne le saura jamais.

Si je pouvais m'envoler comme un oiseau, je volerais jusqu'à toi
Tiens donc ! Sans doute le vers le plus obscur du poème. Ayumi reste particulièrement évasive sur cet oiseau. Se rêve-t-elle en galinette cendrée ou en autruche ? Dans le second cas, elle ne pourrait pas s'envoler, et finalement le résultat reste le même. Cette vision incroyablement pessimiste (à rapprocher de celle de Blaise Pascal) souligne le caractère vain de nos désirs : quand bien même elle serait un oiseau, si elle pioche la mauvaise carte, Ayu ne pourrait même pas s'envoler ! Le vers suivant est encore plus sombre et en rajoute encore dans l'horreur ornithologique.

Et j'offrirais mon aile à ton dos meurtri
Deux interprétations pour ce vers d'une beauté Nami-Tamakienne. La première entend que l'on lise le vers au sens littéral : Ayumi nous parle d'un oiseau à une aile, oiseau qui n'existe pas de toutes façons. Donc quoiqu'elle fasse, elle est vouée à l'échec. La seconde est à peine moins terrible : elle impose la lecture non pas de "mon aile" mais d'"une de mes ailes". On se retrouverait alors avec deux oiseaux, mais ni l'un ni l'autre capable de voler puisqu'ils n'auraient qu'une aile ! Encore pire, peut être pourraient-ils décoller, mais ils seraient alors condamnés à voler en rond, et auraient l'air très cons. Aucun espoir n'est donc permis.

Si je pouvais souffler comme le vent, je viendrais à toi
Encore une fois une imprécision, mais d'une portée certes moins grande que celle vue au-dessus. On aimerait toutefois connaître la nature du vent qu'Ayumi souhaiterait incarner : le mistral ? Ou finalement bien plus tragique, l'alizé, le vent le plus sournois (écoutez donc son dernier album) ? Toutefois, le sens ne change pas vraiment selon la nature du vent, Ayumi parle à son repas, qui commence à roussir sérieusement, et sur lequel elle voudrait souffler afin qu'il refroidisse.

Si je pouvais briller comme la lune, je brillerais sans arrêt sur toi
Une magnifique leçon d'humilité. Alors que de nombreux érudits la considèrent comme un génie de la poésie, Ayumi le déclaire sans appel : elle n'est guère brillante. Connaissant la nature modeste de l'intéressée, on ne soupçonne même pas ici l'utilisation de l'ironie.

Je deviendrais n'importe quoi si je pouvais t'empêcher d'être saisi par la peur
Comme chacun le sait, une viande stressée est moins tendre, plus nerveuse. Ayumi aime le coeur bien tendre et commence à craindre, sans doute sous le poids de souvenirs peu glorieux, que celui qu'elle s'apprête à déguster ait eu quelques appréhensions au moment de mourir. Hélas, elle sait qu'elle ne pourra pas faire machine arrière, ce qui est fait est fait en effet. On termine donc sur une nouvelle note noire ce chef d'oeuvre du romantisme.

Publié dans Décryptage

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J
Article bien trop long pour moi et mon mal de dos (?) ^^
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Y
Mais c'est pas Ayumi la sadique, c'est toi XD Sérieux, ça fait un peu peur de lire des textes comme ça. Tu te demandes pas parfois d'où ça te vient toutes ces idées? Moi en tout cas, j'aurais peur de moi-même si j'étais capable d'écrire des trucs dans ce genre O_O
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J
Ptdrrr. J'ai failli m'étouffer de rire quand j'ai lu le message sous les la la la. Tu as une très jolie plume. Malgré que je soit fan et d'Ayu, et de Kumi et de Nami Tamaki j'aime beaucoup ta vision des choses !^^
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A
L'analyse, enfin le décryptage, me parait dans l'ensemble plutôt véridique - tout du moins, elle se recoupe avec mon avis. Par contre, j'aimerais apporter un autre point de vue pour certaines des phrases de la chanson, que je viens de découvrir, d'ailleurs.<br /> <br /> Si on part de l'hypothèse qu'Ayumi est cannibale, sachant qu'elle ne peut être chirurgienne, voire médecin légiste, peut-être qu'elle assimile la notion du "début de tout" comme le début de la nouvelle vie de son casse-croûte. Dans certaines factions tribales (nipponnes ?), le fait de manger le cerveau d'une personne permet de s'accaparer une partie de son être ! Pourquoi pas - nous parlons d'Ayumi en même temps, là.<br /> <br /> "Si ma vie était éphémère comme celle d'une fleur, je serai en pleine floraison à tes côtés."<br /> En prenant en compte le début de la chanson, ainsi que la métaphore de la fleur, je pense personnellement à la saison des amours chez les chanteuses de J-pop, avec un soupçon du comportement de la mante religieuse. A l'opposé du suicide, je la trouve plutôt en bonne forme. Pour une psychotique, tout du moins.<br /> <br /> "Comment était le paysage que tu as vu quand on t'as poussé dans un abîme de désespoir ?"<br /> Par contre, je ne peux qu'adhérer à ce commentaire plein de justesse. On peut constater néanmoins la relation de masochisme de son prétendant, qui malgré ce genre d'actions à son égard, est resté jusqu'à la poêle aux côtés de son "cœur" Ayumi.<br /> <br /> "Ton cœur nu erre, n'ayant nulle part où aller"<br /> Et on peut constater qu'elle n'aime pas spécialement les assaisonnements avec ses repas.<br /> <br /> "Si je pouvais souffler comme le vent, je viendrais à toi"<br /> Pour ceci aussi, je suis d'accord sur le fait qu'il faille bien refroidir son repas. Mais faites bien attention au fait qu'elle aille à lui, et non pas l'inverse. Cela voudrait-il dire qu'elle n'utilise ni couverts, ni ses doigts ? Encore une question dont seul son psychologue - ou bien son chef de tribu - détient les clés.<br /> <br /> ---<br /> <br /> Sinon, je souhaiterais rajouter quelques lignes sur le clip, qui, après avoir lu ces quelques lignes de texte, n'a absolument rien à voir avec les images. Quid des petits enfants sadiques déchiquetant leurs jouets ? De la chambre à fleurs, et autres positions étranges d'Ayumi, couverte de tatouages, allongée sur le sol ?<br /> <br /> Ou alors, cela soulignerait-il que maintenant qu'elle a dévoré son mari, elle soit obligée de s'occuper de leurs cinq enfants, ce qui la rend nostalgique et dépressive. D'ailleurs, on remarque qu'elle ne fait pas une excellente mère - pauvres enfants jouant avec le feu.
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